La vérité des chiffres peut être très pénible pour les preneurs d’assurances-vie. C’est l’expérience qu’a faite une lectrice fribourgeoise. Plusieurs mois après avoir souscrit une police vie chez l’assureur Generali à Adliswil (ZH), elle a obtenu de ce dernier qu’il lui détaille par écrit la composition de sa prime d’assurance.
«Je dois dire que je suis tombée de ma chaise en regardant les chiffres: la prime risque ampute mon épargne de presque la moitié!!», a-t-elle témoigné à notre rédaction au début du mois de février.
Notre lectrice paye une prime annuelle de 2400 fr. Sur ce montant, 1260,80 fr. sont consacrés à alimenter son capital épargne, soit 52,53% du total. Le solde, 1139,20 fr., sert à rémunérer le risque de décès et les frais de l’assureur. Soit 47,46% du montant payé annuellement, ainsi que le détaille précisément le courrier envoyé par l’assureur ce début d’année (lire le document ci-dessus).
Generali précise encore, dans son courrier, que 1996,90 fr. ont été consacrés à la constitution de l’épargne depuis le début du contrat, conclu à l’été 2022. Le rendement de la somme épargne, poursuit la lettre, est de 1,4%. Ce rendement a porté l’avoir de sa cliente à 2022 fr. Sur cette base, il est simple de calculer que le rendement s’est monté à 26 fr. en un peu plus de 18 mois.
Frais moindres ailleurs
D’ordinaire, les assureurs-vie sont plus cachottiers. Les conditions générales d’assurance n’indiquent généralement pas la répartition précise de ces frais sur la durée du contrat car, affirment-ils, les proportions servent respectivement à alimenter l’épargne, à payer les primes de risque et les frais peuvent fluctuer d’une année à l’autre.
Lorsque les assureurs fournissent ces chiffres, ces derniers montrent que des parties de primes alimentant les parts épargne plus élevées. Sur les 250 fr. de prime mensuelle payés par un lecteur vaudois à ce même assureur Generali pendant deux décennies, 108,80 fr. à 240,50 fr. alimentaient la part épargne (lire l’article: «On lui fait miroiter 50 000 fr., il en recevra moins de 3000»).
Un assuré chez Youplus paye une prime annuelle de 2315 fr. La couverture risque lui revient à 244,70 fr. Les frais administratifs lui coûtent chaque année 60 fr., auxquels s’ajoutent 0,1% du capital assuré et un montant variant entre 0,3% et 0,5% de la somme risque. Comme ces sommes ne sont pas divulguées par l’assureur, le client ne sait pas exactement combien il débourse pour ces prestations (lire notre article: «Youplus, l’assureur-vie qui coûte cher à l’assuré»).
La Finma impuissante
Interpellé sur sa manière de répartir les primes payées entre l’épargne, les risques et les frais, Generali se dit dans l’impossibilité de s’expliquer. «Les réponses générales sont trop imprécises. Il est toujours nécessaire de pouvoir consulter un dossier particulier.» Notre lectrice n’a pas voulu dévoiler son identité à l’assureur de crainte de mesures de rétorsion de ce dernier sur d’autres polices d’assurance.
La Finma, le gendarme des assurances, explique toutefois que «Dans les assurances constitutives de capital (p. ex. assurance mixte), la prime d’épargne représente la plus grande part de la prime totale». Avec une part de 52,53% dévolue à l’épargne, la police de notre lectrice respecte certes ce principe, mais de très peu!
Les compétences de la Finma sont toutefois très limitées pour faire régner l’ordre dans ce domaine: «Les primes en assurance-vie individuelle doivent être justifiées techniquement, mais ne sont pas soumises à l’approbation» du gendarme, explique-t-elle.
Quant aux textes légaux (l’Ordonnance sur la surveillance des entreprises d’assurance privées et la Circulaire de la Finma 2016/06 «Assurances sur la vie»), ils ne sont que d’un secours relatif: ils détaillent, parfois à l’aide de formules mathématiques, la répartition entre épargne, frais et risques.
Mais l’assuré ne dispose pratiquement jamais de toutes les données de base lui permettant de faire lui-même le calcul. En admettant qu’il ait le temps et la volonté de le faire.