Le propriétaire d’une ancienne ferme du village de Mex, aux portes de l’agglomération lausannoise, voulait abattre le bâtiment pour le remplacer par un immeuble comprenant 13 logements sur quatre étages et un parking souterrain. La commune lui a accordé le permis de construire en 2022. Mais ce dernier a été annulé par un jugement du Tribunal cantonal vaudois à la suite d’un recours de Patrimoine suisse, une organisation de défense des biens historiques. Saisi à son tour de deux recours (la commune et le propriétaire), le Tribunal fédéral a confirmé en mai l’annulation du permis de construire.
L’ancienne ferme était classée en note 4, c’est-à-dire qu’elle était jugée «bien intégrée» dans son contexte urbanistique. Mais ce niveau de classement la place sous la compétence municipale: la commune pouvait ainsi décider seule d’une autorisation de démolition.
Toutefois, la bâtisse se situe entre d’autres bâtiments classés monuments historiques, à savoir les deux châteaux des XVIe et XVIIe siècles que compte le village de Mex, dont l’un est doté d’un jardin inscrit au recensement ICOMOS (un inventaire international des parcs et jardins devant être protégés). Cet ensemble fait que le village est inscrit sur la liste ISOS, c’est-à-dire devant être protégé dans son ensemble.
Aussi, lors de la mise à l’enquête, la Division monuments et sites, une branche de l’administration cantonale chargée de protéger le patrimoine, a ouvert une procédure visant à relever le niveau de protection de la ferme au niveau 3, qui interdit une telle démolition. Cette procédure n’était pas achevée lors de l’octroi du permis de construire mais l’a été lors de l’instruction du recours au Tribunal cantonal.
Le promoteur et la commune s’en sont prévalus pour affirmer que l’autonomie de la commune avait été violée, puisque celle-ci s’était vu retirer le droit de décider du sort de cette bâtisse en cours de procédure d’attribution du permis de construire. Un argument rejeté par le TF: ce dernier estime que ce n’est pas le classement en vigueur qui fait foi dans ce contexte, mais les raisons de ce classement. Or, la ferme en question est située dans une zone sensible, entre plusieurs monuments historiques ou protégés et un jardin classé. Elle s’insère par conséquent dans un ensemble devant être préservé de manière intégrale dans toute sa composition et sa substance. La commune n’avait donc pas les compétences pour décider d’y porter atteinte.
Arrêts 1C_400/2023 et 1C_408/2023