Des années de procédure auront été nécessaires pour déterminer si oui ou non une société anonyme active dans l’immobilier a induit en erreur l’acheteur d’un loft sur deux niveaux. Elle avait laissé entendre au client qu’une partie du deuxième étage pouvait être aménagée en chambres à coucher. Mais elle n’avait obtenu de permis d’habiter que pour le premier étage, pas le second. Un prérequis pourtant indispensable, dans le canton de Vaud, pour utiliser cette surface comme chambres. Pour le Tribunal fédéral, l’affaire ne fait aucun doute: l’acquéreur a bel et bien été trompé délibérément. Il récupérera près de 141 000 fr. sur les 865 000 fr. payés à la signature de l’acte de vente.
L’achat litigieux de cet appartement rénové remontait à 2010. Avant celui-ci, le vendeur avait procédé à des aménagements au deuxième étage du loft (pose d’un parquet et d’une cloison). Il s’était aussi adjoint les services d’une courtière, qui avait établi une plaquette de présentation indiquant une surface habitable de 288 m2 au total. Le document précisait que le deuxième étage «comportait deux chambres» et était «aménageable à souhait, avec considérable hauteur de plafonds».
Ce n’est qu’en février 2016, après avoir mandaté un architecte en vue de procéder à des rénovations, que l’acheteur a remarqué le problème. La surface de 66,5 m2, qu’il utilisait comme chambres d’enfants, ne disposait en réalité d’aucun permis d’habiter. Il a alors mis en demeure le vendeur de lui verser une indemnité pour la moins-value de l’appartement, sans succès.
L’acheteur s’est donc adressé à la justice, qui lui a donné tort dans un premier temps. La Chambre patrimoniale du canton de Vaud estimait en effet que la notion d’habitabilité était différente en matière commerciale et en matière juridique. L’espace litigieux était utilisable pour des usages annexes tels que salle de jeux ou coin TV. Et en l’espèce, rien ne prouvait que le vendeur avait donné des garanties spécifiques.
Ces arguments ont été balayés par les instances supérieures. Pour la cour cantonale comme pour le Tribunal fédéral, l’indication d’une surface habitable est présumée être une qualité promise et attendue selon l’expérience générale de la vie. Par son attitude, le vendeur a implicitement donné des assurances à l’acheteur et lui a dissimulé frauduleusement le défaut. Il ne peut pas se prévaloir d’un avis des défauts tardif et doit donc l’indemniser. Sivlia Diaz
Arrêt 4A_499/2022 du 8 août 2023