C’est une surprise dont on se passerait bien au moment d’atteindre sa majorité. Le fils d’une lectrice vaudoise l’a pourtant eue au moment de s’enquérir du compte en banque que son père lui avait ouvert à sa naissance: il avait été clôturé. Au lieu d’y trouver les économies patiemment constituées tout au long des années d’enfance et d’adolescence, il n’y avait plus rien. Adieu, donc, le financement d’un voyage, d’un permis de conduire ou toute autre envie propre au seuil de l’âge adulte.
Ouvert en 2004, le compte était crédité de 13 600 fr. à la fin 2017, dernier relevé à la disposition de notre lectrice. La documentation des années suivantes n’est pas entre ses mains, du fait de sa séparation d’avec son mari.
Aux mains de l’adulte
Sa mère s’est enquise auprès de la Banque cantonale vaudoise, où avait été ouverte la relation. Réponse: le compte en question était en fait un «compte cadeau». Autrement dit: il avait été ouvert par un adulte au nom de l’enfant. Mais il demeurait propriété de l’adulte.
Le compte jeunesse et le compte cadeau ont tous deux pour vocation de permettre la constitution d’un bas de laine destiné à un enfant, dont ce dernier doit pouvoir profiter une fois arrivé à l’âge adulte. Tous deux sont voués à être alimentés par les parents et les autres proches au fil de versements plus ou moins réguliers, de dons lors des anniversaires ou d’étapes dans la vie comme les premières communions et confirmations, les réussites scolaires et extra-scolaires, etc.
Propriété du mineur
Mais il existe une différence de taille entre les deux. Le compte jeunesse appartient à l’enfant. Il est certes ouvert par un parent, qui en détient la signature et assume la responsabilité des entrées et sorties de fonds. Il doit être mentionné sur la déclaration d’impôts de ce dernier. Mais il est transmis automatiquement au titulaire sitôt atteinte la majorité (18 ans). Ce dernier en jouit par conséquent comme il l’entend et doit le consigner, à son tour, sur sa déclaration fiscale.
Le compte cadeau, en revanche, appartient à la personne qui l’a ouvert. En principe, cette dernière ne peut pas être un détenteur de l’autorité parentale, quoique cette disposition varie d’une banque à l’autre. Il est voué à être détenu par un proche, comme un grand-parent, un oncle ou une tante, etc.
Il doit en principe être transmis à l’enfant au moyen d’une donation, soumise à l’impôt si elle est supérieure à 10 000 fr. En revanche, il n’est pas toujours nécessaire d’attendre la majorité du bénéficiaire pour que cette donation soit faite: certaines banques la permettent à partir de l’âge de 12 ans. En général, elle doit être faite à l’atteinte de la majorité, au plus tard avant le 20e anniversaire. Chaque banque applique ses propres règles.
Confusion de dénominations
Dans le cas du fils de notre lectrice, la confusion entre les deux comptes a été accrue par l’usage de dénominations proches lors de l’ouverture du compte. Au début des années 2000, la BCV nommait ses comptes cadeau «compte épargne jeunesse». Actuellement, elle applique encore un système dual: le compte peut être «soumis à l’autorité parentale» ou «soustrait» à cette dernière, précise un porte-parole. En revanche, il n’est pas possible de transformer un compte jeunesse en compte cadeau, ajoute la banque.
Le compte jeunesse présente une protection un peu plus élevée que le compte cadeau. En principe, la gestion doit être faite dans l’intérêt du mineur titulaire. Mais la banque ne peut pas s’opposer à des retraits effectués par le détenteur de la signature s’ils sont faits dans l’intérêt de l’enfant. Le compte cadeau étant la propriété du bénéficiaire, ce dernier est libre d’en faire l’usage qu’il juge bon. Pour le reste, les mauvaises surprises sont à régler au sein des familles avant de l’être, éventuellement, devant les tribunaux.
Yves Genier