Ce couple de lecteurs fribourgeois pensaient disposer d’une bonne solution pour leur voiture électrique: leur immeuble, neuf, est équipé de bornes de recharge intelligentes de marque Esee. Elles devaient permettre le chargement des batteries des voitures électriques des occupants tout en établissant les décomptes individuels. Notre couple décide de ne brancher leur voiture que la nuit pour profiter de tarifs moins élevés.
Mais lorsque les premières factures sont arrivées, surprise: le montant est paru trop élevé pour ne correspondre qu’à des chargements nocturnes. La vérification, pour eux, était facile à faire: leur Tesla a son propre dispositif de paramétrage des horaires de chargement. Or, elle était réglée pour ne charger la batterie qu’à partir de 21 heure. Il était donc impossible que du courant soit consommé à cet usage durant les heures tarifaires diurnes. Le problème ne venait donc pas de la voiture, mais du système des bornes.
«Ces bornes ne communiquent pas l’heure de début ni de fin de la charge, mais uniquement l’horaire de branchement et de débranchement. Cela ne permet pas de facturer la consommation précisément selon un plan tarifaire en heures pleines et heures creuses», constate le couple.
Promesses pas tenues
Lors de la construction de l’immeuble, Groupe E, le distributeur monopolistique de courant électrique dans les cantons de Fribourg et de Neuchâtel, avait sélectionné les bornes Esee, de conception norvégienne. Mais plutôt que d’en assumer elle-même la gestion des décomptes de consommation, elle avait externalisé la gestion de cette tâche à une entreprise spécialisée, Climkit à Vevey. Cette dernière était, notamment, en charge de l’établissement et de l’envoi des factures.
C’est donc à Climkit que le couple fribourgeois a demandé une correction des factures à la fin juillet, demande à laquelle Climkit a accusé réception. Mais les factures des mois suivants ne montrent aucun changement en dépit de plusieurs échanges de courriels entre le couple utilisateur et la société d’affacturage.
Celle-ci a expliqué que les bornes ne communiquent la consommation du client concerné que deux fois par jour, lors du changement de tarif. Aussi, Climkit ne sait pas quand exactement la voiture est en cours de charge. Par conséquent, les factures sont établies sur des moyennes de consommation par tranches de douze heures.
Long silence de Groupe E
Les utilisateurs se sont aussi adressés à Groupe E en septembre. Un employé leur a affirmé que le problème faisait l’objet d’une «prise en charge», puis silence. Le problème est resté irrésolu pendant plusieurs semaines et les factures ont continué d’arriver dans la boîte aux lettres de nos lecteurs. De guerre lasse, ces derniers se sont adressés à notre service juridique en octobre avec ce constat amer: «les deux entreprises concernées, Groupe E et Climkit, se renvoient la balle.»
Interpellées directement par notre rédaction, les deux entreprises ont répondu. Elles «regrettent sincèrement cette situation», qui «fait l’objet de discussions étroites» entre elles «et le client». Ce dernier n’en avait guère entendu parler jusque là.
Une solution est finalement retenue: la borne transmettra à Climkit les informations sur un éventuel chargement toutes les quinze minutes dès le 1er janvier 2024. Une forme de tarification au sondage: comment savoir si le véhicule est en charge depuis une minute ou quatorze minutes avant l’envoi de l’information?
D’ici là, la facturation est adaptée. Le tarif sera fait selon «un tarif unique moyen». Et comme il n’est pas certain que cette tarification provisoire corresponde à l’énergie effectivement consommée, «toute différence par rapport aux coûts effectifs de la consommation réelle sera ensuite compensée dans le réajustement du tarif appliqué l’année suivante».
Il n’est cependant pas fait état d’un changement de bornes. Celles-ci n’ont pas répondu aux promesses: elles ne peuvent toujours pas savoir exactement quand une voiture se recharge, ce qui était pourtant le but affiché de cette technologie. Mais au moins nos lecteurs recevront des factures plus proches de leur consommation réelle.
Yves Genier