C’est dans le cadre des «bureaux prestigieux récemment rénovés» du château de Mühlenhof à Wohlen (AG), près de Zurich, qu’un entrepreneur tessinois a eu rendez-vous d’affaires. Il a rencontré Nick Grossrieder, le chef de l’agence de marketing en ligne Grossrieder & Partner AG, afin de lui confier le rafraîchissement du site web de sa société pour 1500 francs.
Une fois la discussion sur le site web terminée, Sven Flöer, alors partenaire commercial de Nick Grossrieder, s’est joint à lui. Tous deux ont alors vanté à leur interlocuteur les mérites d’un investissement dans la société Atomind. Celle-ci prétendait avoir le feu sacré dans diverses technologies Internet en vogue: intelligence artificielle, Metaverse, gestion d’actifs digitale, porte-monnaie électronique, Blockchain et NFT, selon son site internet. Nick Grossrieder et Sven Flöer ont alors affirmé à leur interlocuteur tessinois qu’une introduction en bourse d’Atomind à la Bourse de Londres était imminente.
Porté par l’enthousiasme
Atomind Group a son siège à Charlestown, à Saint-Christophe-et-Niévès, un paradis fiscal des Caraïbes. Il existe aussi une filiale appelée Atomind LLC, domiciliée au Delaware, paradis fiscal américain. Grossrieder & Partner AG et la société zougoise Show Real AG (anciennement Atomind AG) font également partie du groupe. Le site internet d’Atomind répertorie une demi-douzaine d’autres entreprises dans lesquelles il détient des participations.
L’entrepreneur tessinois n’avait, jusqu’alors, guère de connaissance des technologies numériques mais il se laisse enthousiasmer par les deux jeunes hommes d’affaires. Il a donc pris une participation de 15 680 euros dans Atomind LLC. Il a versé cet argent à Anderson David Ltd, une société londonienne fondée par Sven Flöer. Aujourd’hui encore, le site internet de cette entreprise indique de faux numéros de téléphone pour prendre contact. On n’y peut joindre personne.
Plutôt que des actions d’Atomind LLC, l’entrepreneur tessinois a reçu 16 920 «Atomind (ATMD) Units». Autrement dit: des «asset tokens», c’est-à-dire des titres numériques.
Après cet investissement, Guido Sutter a été invité à d’autres réunions de vente. Sven Flöer et un troisième homme d’affaires travaillant également pour le groupe Atomind, Percy Oliver Müller, lui ont proposé, entre autres, d’investir 25 000 livres sterling dans l’entreprise Senfina, une start-up biotechnologique britannique prometteuse qui devrait également être introduite à la bourse de Londres. L’argent devait à nouveau transiter par Anderson David.
Entrée en bourse reportée
Le Tessinois n’a pourtant pas participé à l’opération. En effet, l’entrée en bourse d’Atomind, présentée comme imminente, s’est fait attendre. On n’a cessé de donner de nouvelles raisons pour expliquer ces retards. Aujourd’hui encore, l’entrepreneur tessinois attend toujours l’entrée en bourse promise. Et il n’est pas certain qu’il trouve un jour un acheteur pour ses jetons numériques.
Interrogé par notre rédaction, Nick Grossrieder affirme qu’il reste un «détenteur de jetons convaincu» d’Atomind, qu’il a recommandé à certains membres de sa famille et à des partenaires en affaires. Sven Flöer répond qu’il s’est entre-temps retiré de toutes les entreprises dans lesquelles il était cité et qu’il prend actuellement un «congé sabbatique». Et Atomind affirme qu’elle étudie une entrée en bourse et qu’elle est en pleine restructuration.
Christian Bütikofer / yg